(Français) Le régime de Paul Kagame est-il à l’agonie ?
Introduction
Le régime de Paul Kagame, longtemps présenté comme un modèle de stabilité et de croissance en Afrique, montre aujourd’hui des signes visibles de fragilité. Derrière la façade d’un pouvoir autoritaire solidement tenu, apparaissent des fissures économiques, sociales, politiques et diplomatiques qui interrogent sur la pérennité du système.
Sur le plan économique
Malgré une croissance souvent citée en exemple sur la scène internationale, la réalité est tout autre pour la majorité des Rwandais. La pauvreté rurale s’aggrave, touchant environ un tiers de la population. Dans le même temps, les coupes budgétaires fragilisent les plus pauvres :
- Le budget santé est passé de 10% à seulement 7% en quatre ans.
- Les programmes sociaux ont subi une réduction de 22% sur l’exercice 2024-2025, avec de nouvelles coupes prévues.

Le pouvoir très centralisé autour du président et de son entourage accentue la perception d’un régime oppressant.
« Les activités publiques qui rassemblent les citoyens au Rwanda se déroulent presque toujours sous la surveillance ou la présence des forces de sécurité, signe d’un pouvoir constamment sur ses gardes ».
Sur le plan politique
Paul Kagame a consolidé un pouvoir quasi absolu grâce à la modification de la Constitution, lui permettant de rester en fonction jusqu’en 2034. Les élections donnent systématiquement plus de 90% des voix au président, alors même que l’espace pour les opposants, critiques et médias indépendants est inexistant.
Une inquiétude grandit concernant une éventuelle succession dynastique, visible à travers la mise en avant publique de sa fille. Or, l’absence d’un plan alternatif crédible rend le système fragile, car il repose exclusivement sur la figure de Kagame.

« Le régime du Président Paul Kagame exerce une forte pression interne, particulièrement lors de ses déplacements. À ces occasions, les autorités administratives, du niveau provincial jusqu’au village, sont mises en demeure d’assurer une mobilisation obligatoire. Les responsables locaux reçoivent instruction d’organiser, de manière contraignante, la participation d’un nombre prédéterminé de citoyens, calculé en fonction de la population de chaque village. »

Cette dynamique accentue les inégalités : alors que 1% de la population détient une part disproportionnée des richesses, la moitié la plus pauvre du pays reste exclue des bénéfices de la croissance.
Sur le plan socio-culturel
La société rwandaise reste sous haute surveillance. La répression politique est justifiée au nom de l’unité nationale, mais elle s’accompagne d’un climat généralisé de peur et de méfiance. Propagande et surveillance permanente réduisent l’espace du débat critique et empêchent l’émergence d’une société civile indépendante.

Le régime de Kigali a longtemps cultivé une image internationale positive : celle d’un modèle africain de discipline, d’efficacité et de reconstruction après le génocide. Mais cette image s’effrite progressivement.
- Avec les partenaires occidentaux : Les relations avec la Belgique, ancien soutien clé, se sont tendues après plusieurs disputes bilatérales. D’autres chancelleries occidentales expriment de plus en plus de réserves quant aux atteintes aux droits humains et au manque de démocratie réelle.
- Sur le plan régional : Le Rwanda conserve une influence importante via son implication militaire en République Démocratique du Congo et en Afrique centrale, ce qui lui assure encore un rôle régional majeur. Mais ces interventions attisent aussi les critiques et alimentent les accusations de déstabilisation.
- Dans les instances internationales : Kigali mise sur les succès militaires et le lobbying actif pour maintenir une image de stabilité. Cependant, cette stratégie s’essouffle face au décalage entre communication internationale et réalités internes du pays.

Conclusion
Le régime de Paul Kagame, tout en gardant une apparente stabilité autoritaire et un certain prestige diplomatique, est fragilisé de l’intérieur. Les inégalités économiques, la répression sociale et politique, ainsi que des signaux diplomatiques de plus en plus conflictuels, tracent les contours d’un système qui s’approche d’un tournant. Sans renouvellement du contrat social et sans ajustement profond, le pouvoir pourrait bien entrer dans une zone critique de déclin.
Par UWINEZA Délice

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